Football : Richard Akiana, entre hier et aujourd'hui, l'histoire et les voyages d'un " oiseau " rare !
- Lyes Baloul
- 3 oct.
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : 7 oct.

C'est l'histoire d'un homme. Un homme qui n'a presque connu qu'une seule langue dans sa vie. Le football. Ce sport universel. Cette discipline qui lui a tout donné. La passion, l'amour, des rêves, des rencontres. L'histoire d'une vie. D'une carrière. D'un homme. Lui, c'est Richard Akiana. L'actuel entraîneur des U18 de l'USM Montargis (R2). 56 printemps à son actif. La barbe a blanchi. Mais la passion pour le ballon rond, elle, est restée intacte. Comme au premier regard. Portrait.
« Maman, tu ne dis rien à papa. Sinon, je suis mort ! ». Cette phrase, Richard Akiana l'a répétée mille fois. Le môme a 8 ans. « À la maison, hors de question que mon père sache que je faisais du foot au FC Epinay-sous-Senart (Essonne). Ma mère ainsi que mes frères et sœurs me couvraient. Parce que pour papa, c'était l'école. Rien que l'école ». Son père fut diplomate pour la République démocratique du Congo. « On habitait près des Champs-Elysées, à Paris. Mon père disait que ce n'était pas pour nous. Il a donc décidé que l'on déménage dans l'Essonne. Il bougeait beaucoup. Notamment à l'étranger ». Une fratrie de neuf enfants. Cinq garçons et quatre filles. « J'ai commencé à jouer au foot avec mon grand frère. Quand je repense à ces moments-là, oui, je deviens nostalgique. Quelle époque ! ». Un jour, avec des copains, le petit Richard découvre un nouveau club. À Villecresnes, à seulement 15 minutes de chez lui. « C'était top ! Un bus qui me déposait chez moi. Je jouais en cadets nationaux. Je devais avoir 14/15 ans ", raconte-t-il. Ce furent les premiers vrais pas de celui qui change de poste. « J'étais défenseur, je suis devenu attaquant ».

Richard Akiana au deuxième rang avec le club d'Epinay-sous-Sénart.
À Corbeil-Essonne avec Rudi Garcia, l'ancien coach de l'OM...
Inscrit en école de vente à Juvisy-sur-Orge (91), Richard Akiana le sait. « Là, je n'ai strictement pas le droit à l'erreur. Je dois rendre des comptes, notamment à mon père ». Mais l'adolescent n'entend guère sacrifier sa passion pour le football. « Quand je suis arrivé chez les juniors au club de Corbeil-Essonnes (DH), j'étais scotché du niveau qu'il y avait. Impressionnant ! Je découvre un autre environnement, un autre football ». Qu'en est-il du père ? « Toujours pas au courant de mon parcours. Rien ! ». La suite ? « Un truc de fou ! J'arrive dans le vestiaire, je vois qui ? Rudi Garcia. Lui, il était en senior, moi en junior. C'était José Garcia, le père de Rudi, qui entraînait les seniors en D3 (National) ». Mis sur le banc dès le premier match avec les juniors, le jeune attaquant Richard Akiana est convoqué par le coach des seniors. « Je n'en revenais pas. Je pensais que c'était une plaisanterie. Je ne comprenais pas trop cette décision, mais j'étais content de l'apprendre. La nuit, je n'ai pas fermé l'œil. Le stress, des interrogations...". Ce jour-là, pour son premier match en seniors, Richard Akiana ne risque pas de l'oublier. « À domicile en Coupe de France. Quand j'ai appris ma titularisation, j'ai paniqué grave. J'avais 17 ans. À la collation d'avant match, je me suis goinfré en gâteau (rire). Je n'arrêtais pas d'aller aux toilettes pour uriner. Par peur. Je ne savais pas comment ça allait se passer pour ma première en seniors ». Galvanisé par Rudi Garcia et ses coéquipiers, le « petit » Richard se délivre. « Il y avait les potes, les membres de ma famille...». Et le père ? « Toujours pas ». Richard Akiana ne retournera pas chez les juniors. Ce fut le prélude d'une histoire avec les seniors sous le maillot de Corbeilles-Essonne, en D3. Son premier but, il s'en souvient. « En pleine lucarne ! », sourit-il.
« Je rentre chez moi. Et là, mon père me dit : on parle de toi dans le journal. C'est quoi cette histoire ? J'ai flippé grave ce jour-là »
Ce qui devait arriver arriva. « Mon père va dans un bar. Il prend tranquillement son café. Il ouvre le journal. Sur quoi il tombe ? Un article sur moi. Le titre : Richard Akiana, la perle noire. Il tombe des nues ! ». L'explication entre le père et le fils risque d'être orageuse. « Il a acheté le journal. Il arrive à la maison, il me dit : c'est quoi ça ? Moi, je suis là. Tout tremblant. Je flippe grave. Et il s'adresse à ma mère : tu as vu ton fils ? Mon père, je me souviens de son regard. Ma mère était là. Elle ne savait pas quoi dire. Elle me regarde, elle regarde mon père. J'étais persuadé que j'allais recevoir une gifle de mon père. Il ne l'a pas fait. Il me regarde et me dit : c'est comment à l'école ? Je réponds timidement. À ce moment-là, je dis à mon frère : le foot, c'est terminé pour moi. Mon père revient vers moi. Incroyable ! Qu'est-ce que j'entends ? Richard, tu veux jouer au foot ? Je réponds avec un oui, mais avec de la peur. Et là, il me dit : tu peux jouer ». Son père finira par le suivre sur les terrains. « Fièrement » !

Créteil, Saint-Dizier, Racing 92, Paris FC, Bourges...
Le baroudeur Akiana ne passe plus inaperçu. Des clubs lui font les yeux doux. Le jeune homme quitte Corbeilles-Essonne et rejoint l'US Créteil, en Ligue 2. « Là, je tombe sur des mecs que je voyais à la télé. Tu rentres dans une nouvelle dimension. Je venais dans ce club pour jouer avec l'équipe réserve en DHR. Je finis avec l'équipe fanion en Ligue 2. Avant l'entraînement, je mange comme un fou. Je finis par gerber sur le terrain. La jeunesse, quoi ! ». Les premières primes tombent dans la poche du jeune garçon. « 6.000 francs, je crois. Mon père ne comprenait pas trop à l'histoire. Il était fou de voir toutes ces sommes-là ». Richard Akiana évoluait parfois en équipe réserve de l'US Créteil. Avec comme coéquipiers : Yann Lachuer, l'ancien joueur de l'AJ Auxerre et de l'US Orléans ou encore Sammy Traoré, l'ex-défenseur du PSG. L'aventure d'Akiana à Créteil fut de courte durée. Il s'engage ensuite à Saint-Dizier (CFA). Trois ans d'histoire. Direction ensuite le Racing 92 (38 buts). Puis une année au Paris FC (N1). Avant un retour au Racing 92, avec à la clé 35 réalisations à son compteur. Le rossignol change d'air. Il prend la route de Bourges, club de Ligue 2, venant de descendre en National. Puis retour à Créteil.
Avec Alain Perrin à l'ESTAC Troyes, l'ex-coach de Lyon, Marseille, Saint-Etienne...
L'ESTAC Troyes s'attache les services de Richard Akiana, en Ligue 2. Un contrat de trois saisons. « Une belle expérience sous la coupe d'Alain Perrin. Un entraîneur avec qui je m'entendais super bien ». Mais au bout de deux ans, il quitte l'Aube. Il signe au Red Star 93, en National. 39 matches pour près de 40 buts marqués. « On avait une équipe de fous. On fait demi-finale de Coupe de Ligue (défaite contre Gueugnon) ». L'oiseau décide encore de s'envoler. Cette fois-ci, le vent l'emmène à Wasquehal (Ligue 2), dans le Nord de la France. « Ce n'était pas un souvenir terrible dans ma tête », clame-t-il. Richard Akiana conclut sa carrière dans l'Hexagone. En passant par Gap puis Paçy-sur-Eure.
Qatar, Indonésie, Vietnam, Singapour, Macao, Chine...
Des escapades à l'international. En effet, Richard Akiana a beaucoup voyagé, notamment en Asie. Au Qatar, il joue 6 mois pour un club d'élite. Cette aventure en appellera d'autres, puisqu'il évoluera respectivement dans divers championnats : Indonésie, Vietnam, Macao, Singapour, Chine, Emirats-Arabe-Unis. « Des aventures humaines. Des rencontres. J'ai pu voir autre chose, d'autres mentalités. C'est intéressant sur le plan humain ».
« Je n'ai pas pu rester en Iran, choqué par un terrible événement »
Une anecdote. Mais qui ne fait guère rire Richard Akiana. « Il était question que je tente une aventure en Iran. J'étais avec un Américain dans l'avion. On avait échangé. On s'est salué à la sortie de l'aéroport. Peu après, à l'hôtel, j'apprends qu'un étranger a été kidnappé. Et quand j'ai vu son visage à la télé, c'était l'Américain avec qui j'ai fait le voyage. J'ai vite décidé de rentrer en France. J'avais peur...».
Une quarantaine de sélections avec la RDC
Richard Akiana totalise une quarantaine de sélections avec la République démocratique du Congo. « Deux participations à la Coupe d'Afrique des Nations (1992, 2000). Quel souvenir ! ». Comment ce père de deux garçons a-t-il débarqué à l'USM Montargis. « Lors du centenaire du club, en 2019. Je revois par hasard Cyril Martini (l'actuel président) et son père. Ce sont des personnes que j'ai connues dans le 91. C'était le démarrage de mon histoire avec Montargis ». Un coup de foudre que le quinquagénaire ne cesse de créer sur les toits. Haut et fort !




